AYMERIC GUENAUD (1331-1339).

 Après la démission de Talleyrand, Aymeric Guenaud, conseiller du roi et depuis longtemps, l’un des maîtres des requêtes de son hôtel fut nommé évêque d’Auxerre le samedi 21 décembre 1331 par le pape Jean XXII, à la recommandation de Philippe de Valois et de la reine son épouse. Ce prélat, né à Tours; et selon d’autres, à Poitiers, est aussi appelé par quelques historiens Aymeric de Durford.

Près de deux ans s’écoulèrent avant qu’Aymeric prit en personne possession de son siége, ce qui arriva le 18 octobre 1333. Dans l’intervalle, il avait promis, le 19 février 1332, à la chambre apostolique, et avait permis à Pierre de la Palu, patriarche de Jérusalem, de bénir et de consacrer le cimetière et l’église de la Chartreuse de Basseville, ce que fit ce prélat le 2 avril suivant. En qualité d’évêque élu, Aymeric assista, le mercredi 8 de ce mois, à l’assemblée tenue en la chambre des comptes de Paris. Le commencement de son épiscopat ne fournit aucun acte important. On sait seulement qu’il fit la consécration du grand autel de la cathédrale en 1334, et, en 1338, celle de l’autel appelé de la comtesse, placé au fond du sanctuaire de la même église.

Sous son gouvernement, le diocèse. d’Auxerre fut en paix, et Aymeric n’eut qu’un procès avec le monastère de La Charité-sur­Loire, ou plutôt avec le prieur de Bonny, dépendant de ce fameux prieuré. Le prévôt de Bonny, officier du prieur, avait fait pendre deux ecclésiastiques anglais qui passaient sur la grand’route. Cette action, contraire aux privilèges de l’Eglise, indigna tellement Aymeric, qu’il envoya aussitôt deux Auxerrois en Angleterre afin de s’assurer si réellement les deux jeunes gens appartenaient à la cléricature. Ce fait ayant été constaté, l’évêque obtint, en 1336, justice au parlement, et les prérogatives de la juridiction ecclésiastique furent maintenues.

Le prieur de Bonny était alors Guillaume de Sainte-Maure, doyen de Saint-Marlîn de Tours et chancelier de France. Ce procès ne les brouilla point, car Guillaume choisit, en janvier 1335, Aymeric pour l’un de ses exécuteurs testamentaires, ce que celui-ci accepta, en apposant son sceau sur le testament du prieur, le 9 novembre 1338.

Une contestation s’étant élevée sur la question de savoir si les chanoines tortriers ou semi-prébendés de la cathédrale dépendaient du chapitre ou de l’évêque, celui-ci s’en rapporta volontiers à des arbitres. Les parties choisirent Etienne Guachet, docteur en décret, et Raimond de Colombiers, chanoine d’Auxerre; après informations et sur l’avis d’habiles canonistes, il fut décidé que, dans les affaires civiles, les semi-prébendés ne pouvaient être traduits ni cités malgré eux devant l’évêque, ni devant son official, mais seulement lorsqu’ils y consentaient volontairement. Cette sentence arbitrale fut prononcée le 23 février 1339, et acceptée par Aymeric dont le caractère paisible ne se démentit jamais.

Huit jours auparavant, l’évêque d’Auxerre, par bulles du 15 février, données par le pape Benoît XII, avait été transféré au siége archiépiscopal de Rouen, en remplacement de Pierre Roger, créé cardinal le 19 décembre précédent. Il prit possession par procureur le Samedi-Saint 27 mars suivant. Ce fut lui qui bénit le successeur de Jean Marcdargent, Robert de Quesné, abbé de Saint-Ouen. Il fonda deux chapelains à l’autel de Saint-Pierre et de Saint-Paul, et donna au chapitre la moitié des novales de la forêt de Lyons. Il avait terminé un peu auparavant un procès qui avait longtemps existé entre ses prédécesseurs et le doyen et le chapitre d’Ecouïs, touchant les dîmes des novales de toute la forêt, qui n’étaient pas dans les bornes d’une paroisse que ces derniers prétendaient leur appartenir, en vertu d’une donation faite par Bernard de Farges et confirmée par le Saint-Siége. Aymeric prétendait, au contraire, que la donation et la confirmation étaient nulles et sans effet pour plusieurs motifs. On prit pour arbitres Pierre d’Arquier, doyen, et Guillaume d’Albusac, grand-vicaire et chantre de l’Eglise de Rouen. Ces deux arbitres statuèrent, que la moitié des terres qui étaient déjà défrichées et en rapport à Bellande et Bellefourche, appartiendrait A l’archevêché; et l’autre moitié, au doyen et au chapitre d’Ecouïs par indivis; quant au reste de la forêt, ils en adjugèrent à ceux-ci la dîme de vingt-cinq acres dans la lande de Marigny, et le surplus resta au profit de l’archevêché.

Le 8 octobre 1341, Aymeric approuva la fondation de la chapelle de Notre-Dame en l’église de Saint-Jacques de Dieppe. Il avait un frère nommé Yoland qu’il pourvut d’un canonicat dans sa cathédrale. Sa grande dévotion envers saint Martin de Tours lui inspira la pensée d’instituer en son honneur une fête solennelle. Enfin, après avoir gouverné l’Eglise de Rouen pendant quatre ans, il mourut le samedi 17 janvier 1343, à Pinterville, terre de son archevêché, située près de Louviers, au diocèse d’Evreux. Son corps fut apporté le mercredi suivant, en l’église de Saint-Paul, au faubourg de Martainville, et le lendemain en la cathédrale où il fut inhumé dans la chapelle de la Vierge derrière le chœur, auprès d’Eudes Bigaud, l’un de ses prédécesseurs. Le chapitre de Rouen fit, en 1769, placer sur son tombeau une plaque en marbre noir portant une épitaphe. Arrachée pendant la révolution, cette plaque fut retrouvée en 1834 chez un marbrier de Rouen, et est aujourd’hui déposée au Musée d’antiquités de cette ville.

Aymeric Guenaud laissa vingt livres tournois de rente à prendre sur Appoigny pour son anniversaire dans la cathédrale d’Auxerre, et pareille somme pour doter une chapellenie à l’autel de Saint-Martin de la même église. Déjà, dès son vivant, le chapitre de Sainte-Eugénie de Varzy célébrait le 1er septembre, à son intention, une messe annuelle du Saint-Esprit.

Il portait pour armoiries :  d’or, à la fasce fuselée de gueules, à une croix de même, brochant sur le tout.

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