PLACE DES VÉENS

Voici un exemple singulier de la dégradation des termes par l’usage que l’on en fait dans le cours des siècles. La cour des Véens était, au XIIe siècle, le jardin des vicomtes, Curtis vice comitum, le courtil des Véens. On en a fait la cour des Vents! C’est aujourd’hui une vaste place irrégulière et triste qui s’étend de la rue Milliaux au pied du cotteau descendant de la Boucherie et de la rue Nicolas Maure à laquelle elle communique par une ruelle étroite, rapide et tortueuse.  Jusqu’en 1762, la cour des Véens n’était pas entièrement publique. On y accédait par deux ruelles qui venaient du quartier haut. La ville ayant acheté alors le jardin du sieur Chapelain, ouvrit la place du côté de la rue Milliaux.  

Les vicomtes, les Véens en français du XIIe siècle, habitaient un hôtel dans la rue Nicolas Maure, et Lebeuf parle d’une porte des vicomtes qui s’ouvrait dans le mur de la cité, derrière le palais des comtes, et qui permettait à ces officiers d’entrer facilement dans la demeure de leurs maîtres (Lebeuf, II, 444).

On ne connaît dans l’histoire qu’un petit nombre de vicomtes d’Auxerre. Ces officiers, qui étaient chargés de rendre la justice aux habitants des campagnes, paraissent pour la première fois vers l’an 900 et disparaissent après 1230. Raynard de Vergy était vicomte sous Richard-le-Justicier. On connaît l’histoire du vicomte Pierre de Courson, le trop fidèle exécuteur des volontés du comte Pierre de Courtenay. Ce vicomte ayant été révoqué de ses fonctions, l’évêque Hugues de Noyers saisit cette occasion pour le punir des procédés dont il avait à se plaindre de sa part. Il le fit arrêter et le fit promener dans une charrette par toutes les rues de la ville, où il reçut à profusion les huées de la populace (Gesta Pontif. Dans Labbe, t. I, Bibliotheca man.).

Le vicomte d’Auxerre jouissait de différents droits dans la ville; il avait sa part sur le rouage des vins et le plantage ; sur les boulangers, sur le sel, les cuirs tannés, etc. (Lebeuf, Preuves, t. II, n° 153 ). L’abbé de Saint-Père percevait la dîme de vin sur le produit du clos du vicomte.

Rue précédente

Retour au plan quartier

Rue suivante

Retour au sommaire