RUE SAINT-PELERIN

Saluons ici le plus vieux personnage historique d’Auxerre, celui auquel nos pères ont dû l’introduction du christianisme au milieu d’eux.  

C’est. vers l’an 258 environ que saint Pèlerin parait être arrivé à Autricus qui n’était pas encore entouré de murs. Il érigea une chapelle, sous le nom du Christ, sur le bord de la rivière d’Yonne, au milieu des populations païennes, selon certains auteurs, et proche la fontaine où il baptisait ses néophytes. D. Viole rapporte avoir vu dans l’église Saint-Pèlerin un puits marqué d’une croix antique qu’il regarde comme l’ancien baptistère (Mss. de la Bibi. d’Auxerre, n’ 127, t. III). Il n’est guère fait mention de l’église Saint-Pèlerin depuis les premiers temps jusqu’au XIe siècle, Elle était alors tombée entre les mains de certains seigneurs laïques, et l’évêque Geoffroy de Champalleman l’en retira grâce à sa fermeté.

Lebeuf dit que ce ne fut qu’au XIIe ou XIIIe siècle qu’elle fut érigée en paroisse (Prise d’Auxerre). En 1145, l’évêque Hugues de Mâcon la donna à l’abbé de Saint-Père-en-Vallée qui chargea un de ses chanoines de la desservir ; elle n’a pas cessé d’être une dépendance de ce monastère.

La rue Saint-Pélerin (Via sancti Peregrini en 1247) (Cartulaire du Pitancier de Saint-Germain, f° 8), qui conduit à l’église, vient de la rue Milliaux et des Jacobins, d’où elle a reçu le nom de « rue par où l’on va de l’église des Frères-Prescheurs à celle de Saint-Pèlerin. »

Il y avait sur la paroisse, au XIIIe siècle, la maison des Filles-Dieu qui étaient chargées du soin des malades et des pauvres ; on les trouve encore en 1614 (Archives de l’Yonne, Fonds abbaye Saint-Père, liasse IV). En 1599, il est parlé de « la maison du Jeu de Paulme de Saint-Pèlerin tenue par Denis Hébert, maître paumier. »

L’église Saint-Pèlerin, après différentes reconstructions, fut rétablie au milieu du XVIe et au XVII siècle. Elle est aujourd’hui étrangement dénaturée, et la partie antérieure est distribuée en logements, tandis que le chœur, qui n’a pas été terminé, sert de chapelle évangélique. On voit, dans cette partie, que c’était un édifice à trois nefs voûtes cintrées, hautes travées, colonnes à chapiteaux déformés. On lit, sur un cintre du bas-côté sud, la date de 1632. Avant les derniers changements que cette église a subis on voyait, à la voûte d’une chapelle du chœur, au sud, des peintures à fresques qui annonçaient qu’elle était dédiée au Sauveur. Elle portait la date de 1653. On y lisait cette inscription en caractères gothiques  

Jesus Nazarenus, rex Judeorum, titulus triumphalis

deffendat nos ab omnibus malis,

sancte Deus, sancte fortis, sancte

et immortalis, miserere nobis, 1563.

O  bone Jesu, illumina oculos meos ne unquam abdormiam in morte, ne quando dixit

 inimicus meus prevalui adverstus eum.

  Dans les caissons étaient peints, fond bleu et cercles rouges, des anges jouant d’instruments de musique ; le monogramme du Christ et un écusson du donateur: d’azur au chevron d’or accosté de 2 oiseaux affrontés, et avec une rosette d’or en pointe.

Sur la clef de l’arc de voûte était une sainte Véronique.

L’autre chapelle du sud (la première) était également peinte et dédiée à sainte Priscille. On y lisait, en capitales romaines, ces quatre vers:

  Priscillam famulos Petrus cum prole pudentem

Baptizat; Paulus doctrina sacra docet.

Sanctorum quid nimirum sit veneremur honore

Tum Sancti Christo quos genuere patres.

  Suivant un marché de réfection de l’escalier de l’Hôtel-de­Ville, en 1580, il y avait alors devant l’église de Saint-Pèlerin un escalier qui ne manquait pas de style et qui servit de modèle pour ce projet de construction (Archives de l’Yonne, Minutes d’Armant, notaire).

Sous le chœur de l’église s’étend une vaste crypte, à trois nefs à voûtes surbaissées sans moulures et retombant sur des piliers massifs.

Cette construction est relativement moderne et du temps de l’église supérieure. On y trouve, en deux endroits, des fragments de colonnes du XIIIe siècle employés dans les murs comme moëllons.

Dans le milieu est une espèce de puits au fond duquel on aperçoit de l’eau. La tradition rapporte que c’est en cet endroit que, au IIIe siècle, saint Pèlerin administrait le baptême.

On remarque, en haut de la rue Saint-Pèlerin, au n° 6, une maison assez belle, appartenant aux dames Religieuses Augustines, et affectée à un grand établissement d’éducation. Cette demeure a été construite vers la fin du XVIIIe siècle par un sieur Boyard-Forterre, commissionnaire en vins, devenu seigneur d’Egriselles. C’est une de ses filles qui, par sa conduite scandaleuse, a provoqué la composition d’un poème licencieux et injurieux pour la famille Boyard, lequel a été imprimé clandestinement. L’auteur, jeune avocat d’Auxerre, n’y employa que des rimes en on, et pendant plus de cinq cents vers. Poursuivi pour ce pamphet, il fut obligé de s’exiler en Amérique.

 

RUE DE LA CHÊVRERIE, AUJOURD’HUI DE SAINT-PÈLERIN ( en bleu sur le plan )

  La rue qui se trouve au bout de la rue Saint-Pèlerin a reçu, dès le XVe siècle, le nom de rue de la Chêvrerie. On ne trouve point d’explication de ce nom dans les actes. Les maisons du côté gauche, en descendant, tenaient jadis aux murailles de la fortification de la ville ; il y avait, comme d’usage, un chemin de ronde entre deux.

On voit encore, non loin de l’église Saint-Pèlerin, quelques restes de maisons de bois du XVIe siècle dont les poteaux sont munis de petits sujets sculptés dans le style gothique.

L’hôtel du Bœuf couronné existait dans cette rue, aux XVe et XVIe siècles.

Au bout, près de la porte du Pont, était le Carre de Biarne et sous la maison des Dissons passait, au XVIe siècle, le conduit des eaux de la ville qui descend jusqu’à la rivière.

La partie basse de la rue s’appelait, en 1621, la rue des Teinturiers, à cause de la fontaine de ce nom qui s’y voyait encore au en 1869 (Archives de 1’Yonne, Reconnaissances des Rentes, Fonds Saint-Marien et Saint-Pierre).

Cette rue était à la fin du XIXe siècle peuplée d’ateliers de carrosserie, de forgerons et d’autres métiers du même genre et présentait un aspect très animé.

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