HENRI DE VILLENEUVE (1220-1234)

 Guillaume de Seignelay ayant quitté l’Eglise d’Auxerre en février 1220, et pris possession de celle de Paris, les Auxerrois mirent en compromis l’élection de son successeur. Quoique assez nouvelle, cette manière de procéder au choix d’un évêque ne fut point préjudiciable au diocèse. Les personnes à qui l’on confia l’élection, jetèrent les yeux sur Henri, chantre de la cathédrale et surnommé de Villeneuve, parce qu’il était né dans un village de ce nom au diocèse de Paris, entre Marnes et Saint-Cloud. Henri fut sacré le dimanche 20 septembre 1220. On eut dit que la Providence permettait qu’un Auxerrois fût transféré à Paris, afin qu’un Parisien fût placé sur le siège d’Auxerre.

On avait cru qu’aucun évêque d’Auxerre, avant Bernard de Sully, n’était allé à Sens pour y prêter le serment d’obéissance à l’église métropolitaine et à l’archevêque; mais l’abbé Lebeuf

a découvert, au siècle dernier, dans la Bibliothèque du roi, un Pontifical de Sens qui contient la formule que signa Henri de Villeneuve et qui était ainsi conçue : Ego Henricus Altissiodorensis episcopus, Deo et sancte rnatri Ecclesie Senonensi, et tibi pater, Petre; tuisquc sucecssoribus debitam subjectionem et obedientiam ore promitto, et manu confirmo. Cette signature consistait en une simple croix que chaque évêque faisait avec la plume au bout de la formule qui se trouvait toute dressée.

Henri, né de parents d’une condition médiocre, prouva que sa promotion ne lui inspirait aucune pensée d’orgueil ni de vaine gloire. D’un caractère doux, il sut cependant montrer à l’occasion beaucoup de vigueur pour résister aux ennemis de son église. Ceux-ci avaient relevé la tète à l’arrivée du nouvel évêque, dont l’influence leur semblait peu redoutable : ils ravagèrent les domaines de l’évêché et pillèrent les couvents. Ce prélat fit tout ce qu’il put pour arrêter ces violences, mais il était loin d’avoir la force et l’autorité de ses deux prédécesseurs.

Il   ne négligea rien pour défendre tous ses droits de juridiction spirituelle. Dès la seconde année de son épiscopat, le doyenné de la cathédrale étant venu à vaquer, il s’éleva une contestation, entre lui et le chapitre, sur la juridiction du doyen, qui était alors très étendue. Il s’agissait de savoir si cette juridiction devait appartenir à l’évêque où au chapitre. Les parties ayant fait un compromis entre les mains d’Hervé et de Matthieu, cha­noines, ces arbitres déclarèrent que, pendant la vacance du doyenné, l’exercice de la juridiction décanale devait être dévolu à l’évêque, protestant toutefois qu’ils ne voulaient rien définir touchant la juridiction sur les chanoines de la cathédrale. Cette décision fut rendue en novembre 1221. L’évêque d’Auxerre continua aussi de contester au doyen les droits que son prédécesseur avait combattus, et sur lesquels il avait voulu des explications. Le différend roulait ici sur le renvoi des causes et des émoluments de leurs justices, en ce qui regardait la ville, la paroisse de Saint-Georges et les sujets de l’abbaye de Celles, sans y comprendre la paroisse de Saint-Loup. Il y était aussi question de décider si c’était à l’évêque ou au doyen à prendre connaissance de l’hôtel-Dieu de Mont-Artre, de la maladrerie de Saint-Siméon, etc. Cette contestation fut réglée par sentence arbitrale de Gautier Cornut, archevêque de Sens, en 1224. Erard de Brienne et Philippe, sa femme, cédèrent à Henry, en 1222, tout ce qu’ils possédaient à Molesme.

Le cardinal Conrad, évêque de Porto, légat du pape en Languedoc, avait indiqué un concile contre les Albigeois à Sens; mais la maladie dont Philippe-Auguste fût en ce temps attaqué obligea de tenir ce concile à Paris. Il s’ouvrit le 6 juillet 1223, et c’est pendant sa tenue, le 14 du même mois, que le roi mou­rut à Mantes, après un règne d’un peu moins de quarante quatre ans. Les prélats réunis pour ce concile, et Henri de Villeneuve était de ce nombre, assistèrent à ses obsèques dans l’église abbatiale de Saint-Denys. Le 1er août de cette année, la comtesse Mathilde établit à Auxerre une commune avec des échevins.

L’évêque d’Auxerre visita tout son diocèse en 1225, principalement l’église de Gien. Par lettres du mois de janvier, il certifia qu’une donation avait été faite aux moines de La Charité par la comtesse Mathilde, et en mars, moyennant le paiement au roi d’une somme de 600 livres, il obtint de ce prince, à cause de la faiblesse de sa santé, l’exemption des charges diverses qui lui incombaient pour la guerre contre les Albigeois. Le tiers des dîmes de Varzy lui ayant été disputé par Simon de Chàtelay, Hugues, seigneur de Lorme, les mit d’accord par acte du mois de mai 1226. Mathilde, comtesse de Nevers, lui donna, en février 1227, à lui et à ses successeurs, le droit de conférer la chapelle qu’elle, avait fondée dans son château d’Entrains. Henri admit, la même année, les Cordeliers, du vivant de saint François, leur fondateur, dans sa ville épiscopale, et poursuivit avec zèle les travaux de la nouvelle cathédrale dont il fit faire, en 1230, les vitraux du chœur sur lesquels on voit un agneau pascal qui est la représentation même du revers de son sceau ou du contre-scel, ainsi qu’elle se voit dans les actes de son temps avec ces mots: Secretum episcopi.

S’étant retiré dans le château de Beauretour, paroisse de Charbuy, Henri y fut atteint d’une esquinancie dont il mourut, le 18 janvier 1234, après treize ans et quatre mois d’épiscopat. Son corps fut rapporté à Auxerre et inhumé dans le nouveau chœur de la cathédrale.

Évêque précédent

Retour à la liste des évêques

Évêque suivant

Retour au sommaire