FAUBOURG SAINT-GERVAIS  

Au-delà du pont de l’Yonne, sur la rive droite de la rivière existe, depuis les temps les plus anciens, le faubourg de Saint-Gervais, dont l’importance a bien varié dans le cours des siècles. Il tire son nom d’une église élevée sous le vocable des saints Gervais, Protais, Nazaire et Celse, par saint Marin, diacre de l’évêque Didier, vers l’an 620. L’église s’est-elle placée au milieu des maisons déjà agglomérées ou a-t-elle été la cause de la naissance du bourg? Je crois que l’on peut adopter l’une ou l’autre supposition, mais, dans le premier cas, quel nom avait le bourg antérieurement au VIIe siècle ? c’est ce que rien n’indique.

L’invasion des Sarrasins, en 732, ruina le bourg de Saint-Gervais, et l’église ne se releva qu’avec peine. Il y avait, du temps de Charlemagne, un monastère d’une certaine importance qui reçut les corps de plusieurs évêques d’Auxerre. Cette maison fut de nouveau ravagée par les Normands et, ayant été réduite en prieuré, elle fut donnée à l’abbaye de Molesme, au XIIe siècle.

Le bourg de Saint-Gervais avait pour annexes le hameau de Jonches situé sur la pente de la montagne qui s’élève à droite de la route de Seignelay, et celui de Laborde qui est caché sur le plateau même du Thureau du Bar. Il présentait, au moyen-âge, cette disposition singulière que les ducs de Bourgogne s’en étaient réservé la suzeraineté, de sorte que le comte d’Auxerre le tenait d’eux en fief, d’où lui est venu le nom de Garde de Saint-Gervais. Les bourgeois en étaient régis par un maire et jouissaient de certains privilèges tels que celui de droit d’usage dans la forêt du Bar. Ils n’ont perdu cette dernière et précieuse ressource que depuis le milieu du XVIIe siècle et après l’avoir recouvrée un instant pendant la Révolution, ils l’ont perdue de nouveau et sans retour par l’incurie des intéressés.

L’exemption des droits de minage y était aussi en vigueur. Une infraction qu’y voulut faire le voyer de la ville, en 1232, au détriment de l’abbaye de Pontigny qui y possédait une maison, amena un jugement qui sanctionna le privilège. On voit, par la relation des juges, que cet officier n’y allait pas de main-morte dans ses fonctions. Les habitants ayant refusé de payer le minage, il rompit leur boisseau, brisa les meubles d’une maison et emmena un des chevaux de labour (Archives de Pontigny, Auxerre).

Les comtes avaient, à Saint-Gervais, un four banal que Guillaume II, l’un d’eux, et Alix, sa femme, donnèrent à l’abbaye de Crisenon avec le droit d’usage dans la forêt du Bar. C’était un privilège exclusif et productif; mais une autre Alix, épouse du comte J. de Chalon, ne se gêna pas pour enfreindre ce privilège, feignant d’ignorer le droit des religieuses, et elle fit construire un autre four. L’abbesse de Crisenon s’opposa vivement à cet empiètement et amena la comtesse à reconnaître ses torts, en 1277, et à inviter les paroissiens du bourg en général et ses propres bourgeois, à ne pas aller cuire leur pain ailleurs qu’au four des dames. Alix fit démolir son four et autorisa l’abbesse à en faire autant de ceux qu’on élèverait à l’avenir.

L’église paroissiale et prieurale était située loin des habitations, au-dessus du chemin de fer et à gauche de la route de Nevers à Sedan, au-dessus du point où elle s’embranche dans celle de Lyon. La paroisse était fort étendue et la position de l’église fait supposer qu’il y avait anciennement des habitations aux alentours qui auront été détruites dans les guerres (En 1234, Renaud Sauguenet vend à l’ordre du Temple une maison située devant l’église Saint-Gervais, pour 70 livres (Arch.de l’Empire, S. 5235, cartulaire, f° 54).

Dans la Description de la France, en 1780, on voit un dessin de l’église Saint-Gervais qui représente un petit portail accosté à gauche d’une tour carrée, sur la nef petit clocher; chevet circulaire percé dune baie cintrée.

La disposition actuelle du bourg, tracée par les deux routes de Paris à Lyon et d’Auxerre à Seignelay, parait ancienne. On la trouve, dès 1339 (Livre des rentes de l’Hôtel-Dieu), sous ces titres : « Grande-Rue de Saint-Gervais qui va du pont à Monestaul, devant Saint-Cosme. — Chemin de la barre (la barrière) du pont à Saint-Bris. » Il y a ensuite quelques voies secondaires: le chemin du pont au moulin Mileau; le chemin de la barre à Saint-Gervais, c’est-à-dire à l’église; la rue de Saint-Cosme qui menait au bourg Saint-Martin.

En avant du pont s’élevait une barrière entourée de maisons au commencement du XIVe siècle. Mais les invasions anglaises et les malheurs qui les suivirent ruinèrent le bourg qui ne reprit jamais beaucoup d’importance. il n’y avait que 25 feux en 1515 et 45 en 1666.

A l’entrée du pont était une porte fortifiée en laquelle existait un autel qu’on rétablit en 1657, à l’aide des aumônes des fidèles. Elle fut démolie en 1734. Sur le côté gauche et avant d’entrer sur le pont, s’élevait la chapelle de Notre-Dame-des-Aides dont les restes ont été démolis au XIXe siècle (Archives, Fonds de la fabrique Saint-Gervais). Il y avait aussi un moulin sur le pont, en 1339, Si l’on en juge par ces mots « Girard li muniers demorant sur le pont. »

A la même date, il est fait mention du gouverneur de la charité de Saint-Gervais (Livre des rentes de l’Hôtel-Dieu). Sur les bords de l’Yonne il existait un chemin qui servait à la navigation et qui séparait toujours la rivière des héritages.

A gauche de la magnifique chaussée de la route moderne de Lyon, au milieu du faubourg, s’élève un petit castel qui doit son origine à un personnage dont 1e nom est devenu populaire dans nos pays. Le comte de Spaar, maréchal-de-camp des armées du roi, trouvant le site de Saint-Gervais à son gré, acheta, en 1768, des jardins qu’il réunit et y fit élever une maison d’assez belle apparence pour mériter le nom de château dans un pays où ils sont rares.

A droite de cette même route s’élèvait l’abattoir public établi en 1853, et à côté un grand bâtiment appelé, un moment, le Grenier d’abondance, qui fut construit en exécution d’un décret de 1858 sur la création des approvisionnements de réserve des grains par les villes, dernière mesure du régime de la réglementation que la liberté du commerce, proclamée peu de temps après, devait rendre vaine.  

Voici un dernier souvenir à l’église Saint-Gervais. La Révolution allait la supprimer car elle était éloignée des habitations, et n’avait plus de raison d’être sous d’autres rapports. Le 12 mars 1791. Un arrêté du Département, singulière autorité en matières religieuses, décida que la paroisse serait réunie à celle de Saint-Pierre, et que l’église Saint-Gervais serait conservée seulement comme chapelle où le curé enverrait dire la messe le dimanche. Les paroissiens de Saint-Gervais n’entendaient cependant pas être ainsi privés de leur autonomie séculaire: ils réclamèrent, mais en vain, leur ancien état paroissial; ils durent se résigner.

L’ouverture du chemin de fer de Laroche à Auxerre au mois d’août 1855, a donné au faubourg Saint-Gervais une existence et une activité nouvelles. Des usines et des magasins s’y sont établis.  

 

Avenue Gambetta.  — En 1874, Léon Gambetta vint à Auxerre rendre visite à ses amis en politique : Paul Bert et Charles Lepère. Après son décès, en 1882, l'avenue de la gare prit son nom. Avant la déviation d'Auxerre, elle était sur le tracés de la RN 6 qui franchissait la ligne de chemin de fer par un passage à niveau fort incommode. Ce quartier a beaucoup souffert du bombardement américain de 1944. 

Avenue jean Jaurès. — A gauche, on sortant du pont, s’ouvre la route nationale n° 77 sur le tracé de l’ancienne voie romaine. 

A un kilomètre environ de la ville, du côté gauche de la route, se voit un monument funéraire érigé à la mémoire d’un sieur Crochot, ancien conseiller de préfecture, mort en 1827.

Il avait réglé lui-même, dans son testament, qui est un chef-d’œuvre d’excentricité, les dispositions de son tombeau. Sur un massif de quelques mètres carrés, entouré de fossés profonds s’élève un édifice de style dorique, à colonnes soutenant une lourde frise. Sur la façade est écrit : île de la Rosière. Sur les murs sont des sentences banales où les cendres, la poussière et les Champs-élysées se marient agréablement.

C’est le même personnage qui a fondé un prix annuel pour la glorification d’une vertu morale, mais cela n’a produit, jusqu’ici, que d’assez maigres résultats.

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