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Le grand-père : Pierre Restif
Le grand-père Pierre Restif qui habitait à Nitry où il semble bien que la famille avait son siège, ses biens depuis longtemps, est un personnage haut en couleur, l’archétype de l’homme influent d’une paroisse qu’il gouverne en fait, même s’il n’est que le représentant du Seigneur du lieu — pour le cas de Nitry avant tout l’abbaye de Molesmes, puissant propriétaire de terre, depuis des siècles, dans la contrée. Tous lui sont soumis, à commencer par sa femme, la respectable Anne Simon, qui se précipite au devant de lui lorsqu’il arrive, le sert à table, ose à peine murmurer lorsqu’il frappe jusqu’au sang son fils, pourtant adulte, à coups de fouet, parce qu’il a osé adresser la parole à une jeune fille au sortir de la messe. Brutal ? Non pas ! Il exerce là ce qui lui semble indispensable pour refréner une liberté qu’il n’admettrait chez son fils de vingt ans qu’avec sa permission. Pierre est intelligent, mais sans doute quelque peu paresseux, dissipateur de ses biens, Il découvre soudain, par une lettre anonyme que son unique fils, alors à Paris, est en voie de contracter mariage et, ainsi, d’échapper à son autorité, laissant sans successeur mâle le bien de la famille qu’il peut seul conserver. Edme restif est né le 16 novembre 1690 à Nitry. De sa petite enfance, peu de choses à retenir si ce n’est que la formation du caractère de l’intéressé, en dehors de l’influence de son père et de celle de sa mère, fut celle du brave curé Pinard et plus encore du maître d’école, Berthier. Celui-ci dont Restif nous rapporte complaisamment les recommandations de portée très morale qu’il ne manquait point de faire à ses élèves, avant la période des vacances et en tout début de la rentrée, est présenté comme le modèle de l’homme de son temps, affectueux autant que sage. Edme Restif est en premier lieu loué par son fils pour son attitude pendant le terrible hiver de 1709. Edme Restif, de nature très laborieuse, prévoyant — qualités qui ne paraissent guère être celles de son père — sauve sa famille et secoure les habitants du village par les dispositions qu’il a prises. Dommage que dans le même temps, ou presque, un parent, familier de la maison, avocat à Noyers, écrive à Pierre Restif les lignes suivantes : « Je vous renvoie un bon sujet ; cela ne fera pas un miracle d’esprit ; mais pour un bon juge, pour un bon père un jour, pour un bon mari, meilleur que vous, pour tout ce qu’il y a d’honnête, oui cela le fera, je vous en suis garant. Quant à ses progrès, il a de l’ouverture pour tout ce qui est d’affaire et d’utilité ; mais pour tout ce que vous aimez tant, mon cher Pierrot, c’est un sot tout à plat. Je vous congratule de ses qualités et de ses défauts, entendez-vous ! et de ses défauts... ». En quelques lignes, on ne saurait mieux marquer l’opposition des facultés du père et du fils. Et voici que le drame va se présenter. Pierre Restif qui n’est qu’un paysan, mais un paysan « aisé » a envoyé son fils Edme à Paris, chez un magistrat. Edme qui est bien tourné s’amourache d’une jeune fille, jolie, de bonne famille. Les choses sont avancées. Mais une lettre anonyme vient aviser Pierre Restif. C’est la catastrophe : plus de fils pour prendre sa relève... Il bondit. Une lettre arrive à Paris ; Edme est averti que son père, malade, veut le voir. Edme est obéissant de nature. Il prend aussitôt le coche d’eau pour Auxerre. Au débarcadère, le valet de son père, Toulesjours, lui amène un cheval. En route, pour Nitry. Mais voici qu’après Vermenton, au lieu de poursuivre droit sur Nitry, on oblique en direction de Sacy. Pourquoi ? Le « suspense » dure peu. A peine Edme Restif a-t-il le temps d’apercevoir trois jeunes filles sans grâce aucune, occupées à récolter de lourds paquets de chanvre à l’orée du village, qu’on arrive à la porte de Thomas Dondaine, un « richard » de Sacy, sorte de brute, astucieux et avare. Pierre Restif est dans la maison, apparemment en fort bonne santé, mais non moins d’humeur peu amène. Et sans préliminaires autres qu’un salut sèchement rendu, il annonce à son fils ébahi, effondré, qu’il a décidé de le marier, dans les trois jours, à l’aînée des trois filles de Dondaine, la moins jolie — si l’on peut dire — des créatures qu’il a remarquées à l’entrée du village. Dans les trois jours... Ceci, outre qu’il faut bien entendre que les deux compères n’entendaient pas laisser traîner les choses, sous-entend que le curé avait permis de supprimer les trois bans canoniques de vingt jours qui permettaient à quiconque de faire valoir les empêchements à mariage. Tout avait donc été astucieusement manigancé. Disons que cette union, entièrement de convenances, révèle que les deux tyrans de village avaient combiné une « affaire » de reprise de terres, Thomas Dondaine fournissant l’argent, Pierre Restif, les bras et le labeur de son fils. D’amour dans ce mariage, c’est de cela évidemment, qu’il n’était pas question. Edme doit pourtant avoir près de vingt-trois ans. Pierre Restif et son fils s’en retournent à Nitry et, chemin faisant, le père marque à son fils une complaisance qui veut lui faire passer la dure exigence qu’il a imposée. Edme, un faible, conditionné par une éducation dont nous n’acceptons plus la rigueur, se plie à la volonté de son père et même, ému de sa condescendance, manifeste une vive émotion où la piété filiale masque la blessure du cœur que l’on comprend si bien. Et voici le drame complètement imprévisible. Dès le lendemain, Pierre Restif tombe malade et sent que sa fin ne tardera guère. C’est pourtant un homme dans la force de l’âge quarante-deux ans. Il refuse à peu près de se soigner, ne se laissant guère approcher que par son fils auquel il fait ses ultimes recommandations. Il meurt dans la nuit suivante. |
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