INTRODUCTION.

  AUXERRE A DIFFÉRENTES ÉPOQUES

AUXERRE CELTIQUE ET ROMAIN

  L’existence d’Auxerre au temps des Celtes ne peut être mise en doute, quoiqu’aucun monument ne la constate, et tous les historiens sont d’accord sur ce point. Quand du haut de l’esplanade du Temple on promène ses regards au sud sur la riche vallée de Saint-Martin-lès-Saint-Julien, parsemée de maisons, de jardins, de plantations, on a sous les yeux la place qu’occupait sans doute l’Auxerre celtique.

Comment était bâtie cette ville primitive d’Autricus, l’une des capitales des Senones? Les Celtes n’ont point laissé de vestiges de leurs monuments, s’ils en ont eu, Auxerre n’est pas mieux favorisé sous ce rapport que les autres villes. La plaine de Saint-Julien recèle dans son sein les débris de la ville gauloise, ravagée par les barbares qui la détruisirent de fond en comble.

Des fouilles faites à diverses époques ont amené la découverte de statères de Philippe, de monnaies romaines du haut et bas empire. 

L’occupation du sol du faubourg par des habitations, dans un temps reculé, est incontestable. Les historiens locaux racontent de nombreuses découvertes d’aires de maisons et de traces de puits. On remarque généralement qu’il faut enlever plusieurs pieds de décombres apportés de la ville haute pour trouver le sol primitif. Ces couches de débris, très hautes sur les abords de la promenade de l’Eperon, renferment aussi des vestiges romains, ce qui porte à croire à l’abandon de la ville basse dès le Ve ou le VIe siècle. Mais en creusant à quatre pieds du sol on arrive aux murs et aux édifices de la ville primitive. Les morceaux sculptés, les pierres de taille se rencontrent rarement; les maisons découvertes n’étaient qu’en moëllons.

Lorsque les Romains eurent conquis définitivement la Gaule, ils se mirent à la percer de routes admirables dont les traces ont subsisté jusqu’à nous. L’Autricus des Senones fut reconnu digne de recevoir la direction de la grande voie d’Autun à Boulogne.

On en connaît l’itinéraire : AUGUSTODUNUM; ABALLO; CHORA; AUTRICUS: EBUROBRIGA;  AUGUSTOBONA, etc.

La voie, sortant des bois de Tourbenay, des hauteurs de Vaux, se dirigeait sur le faubourg actuel de Saint-Martin-les­Saint-Julien, et diagonalement sur le pont d’Yonne.

D’un autre côté, dans la direction de l’ouest, en remontant le ruisseau de Vallan, au-dessous du faubourg de Saint-Amatre, était un temple d’Apollon, tandis qu'aux bords de L’Yonne était un atelier monétaire dans lequel on a trouvé des coins à l’effigie de Tibère.

Le prolongement de la ville d’Autricus dans la partie de l’Auxerre moderne qui forme la paroisse Saint-Père, paraît indiqué par les monnaies du haut empire qu’on y a recueillies, et par l’établissement de la première église sous le vocable de saint Pèlerin, sur le bord de la rivière d’Yonne.

La civilisation romaine amenait avec elle tout son cortège de dieux, et ils eurent des temples dans Autricus. Outre celui d’Apollon, une frise conservée au musée nous apprend qu’il y avait un temple de Neptune. La déesse Yonne ne pouvait manquer d’y être honorée. Mercure y recevait des hommages. Deux chapiteaux, approchant de l’ordre toscan, indiquent encore un autre dieu.

Les vestiges romains nous pressent ainsi de toutes parts.  

LA CITÉ

  Cette partie de la ville ne doit pas être oubliée. L’explication de son origine a été un sujet bien controversé. On a voulu voir dans cette sorte de parallélogramme qui longe au nord les rues d’Orbandelle et du 4 septembre, et au sud des Boucheries et la rue Sous-Murs, qui borde à l’est la rivière d’Yonne et à l’ouest le palais, la tour de l’horloge et la rue des Cordeliers, on a voulu voir là une forteresse élevée par César, vainqueur des Gaulois de Vellaunodunum, pour les tenir en respect ; d’autres ont écrit que c’était le quartier où se retirèrent les premiers chrétiens au IIIe siècle.

Ce fut plutôt tout simplement le lieu de retraite choisi par les habitants pour se mettre à l’abri des courses des Barbares, lorsqu’à la fin du IIIe siècle et au commencement du IVe ceux-ci commencèrent à franchir le Rhin et à entamer les Gaules.

A cette époque le paganisme ébranlé voyait ses temples abandonnés pour le Dieu des chrétiens. A Autricus, saint Pèlerin avait bâti, vers l’an 260, une petite église sur le bord de l’Yonne et attirait les adorateurs des faux dieux. Les temples, devenus inutiles, furent alors transformés en carrières. Les colonnes, les chapiteaux, les statues, les inscriptions, les autels, tout fut bon pour former l’enceinte fortifiée et l’on vit bientôt s’élever cette fameuse cité qui ne fut jamais prise, si l’on en croit les chroniqueurs.

En effet, défendue au levant par l’Yonne qui baignait ses pieds, au nord par un grand étang comblé dans le moyen-âge, au sud par une pente escarpée et des marécages, elle n’était vulnérable qu’à l’ouest, où sans doute on avait préparé tous les moyens de défense.

La science archéologique a mis hors de doute ce fait que la plupart des villes gallo-romaines avaient des enceintes du IIIe ou IVe siècle, que les pierres de taille qui les formaient provenaient d’édifices antérieurs.

La cité d’Auxerre se trouve dans les conditions générales, pourquoi vouloir lui faire une histoire exceptionnelle ?

Les chroniqueurs locaux renferment sur 1’histoire de la cité des traits utiles à faire connaître. Les Actes de la Vie de saint Pèlerin portent que ce saint se transporta au pays Auxerrois et de là à Autricus. Le chroniqueur ajoute que celle ville n’était pas encore à cette époque entourée de murs: « Tunc temporis necdum murorum munitione cingebatur. » A quelqu’époque qu’on fasse descendre la composition de la Vie de saint Pèlerin, au IVe, au VIe, même au VIIe siècle, il est évident que l’auteur veut parler des murs de la cité romaine, car ceux de la ville moderne ne sont que du XIIe siècle.

La vie de saint Amatre nous apprend la date la plus récente, à laquelle il faut nous arrêter pour la construction de ces murs. C’est que du temps de ce saint un citoyen nommé Ruptilius possédait une maison dans l’enceinte de la cité, « in claustrurn ipsius civitatis. » Lorsque les demons chassés par saint Martin d’une île de la Loire, vinrent à Autricus, ils causèrent beaucoup d’inquiétudes aux habitants, sur les chemins qui y conduisaient. Alors saint Amatre se porta à leur rencontre, les exorcisa et les mit en fuite. Le peuple se tenait en foule aux portes de la cité: « Quo viso frequens populus civitatis glomeratim se portis  proripiebat (Vie de saint Amatre par Etienne Africanus).

Quand on examine une carte de la cité et de ses abords, on y remarque les dispositions successives qu’ont apportées les siècles. En premier lieu, la route romaine venant d’Avallon par Vaux descendait diagonalement la vallée pour se diriger sur le pont d’Yonne, en laissant la cité sur la gauche, au sommet du plateau; 2° la voie d’Entrains à Auxerre venait passer sous les murs de la cité par les rues actuelles du Temple et de Paris, pour rejoindre la voie d’Auxerre à Paris. Un court embranchement, qui traversait le faubourg Saint­Martin, mettait la voie d’Autun en communication avec celle de Sens.

On pénétrait dans la Cité par deux portes:

1°, En venant du pont d’Yonne par la rue Joubert et par la porte Féchelle ou Fécaut, qui conduisait à la rue de la Fécauderie et celle-ci au forum, à la Place du Marché, aujourd’hui de l’hôtel-de-Ville; 2°, Au nord-ouest par l’arcade actuelle de l’Horloge, qui menait à la place dont nous venons de parler. C’était là l’unique artère qui fît communiquer directement aux routes du dehors. Les autres passages pratiqués aux temps anciens dans les murs de la cité, tels que la poterne de Saint-Pancrace et la poterne qui menait à Saint-Germain, n’avaient point de prolongement.

Un fait qui frappe dans la disposition de la cité, c’est le petit nombre d’artères qui la desservent. On trouve dans le sens du sud au nord la rue Joubert. Elle est coupée à angle droit par quatre autres rues qui divisent la cité de l’ouest à l’est dans le sens de la longueur: les rues Fécauderie, des Lombards, de Philibert Roux et Fourier. Quelques rameaux se bifurquent sur ces grandes lignes, mais n’offrent pas d’importance. La position qu’occupe la cathédrale à l’une des extrémités de la cité montre que la direction des rues est fort ancienne et que ce monument n’y a influé en aucune façon. Le sol des constructions était bien inférieur au niveau actuel, car il faut creuser à plus de trois mètres pour trouver le terrain naturel. Au-dessus sont des terres rapportées, des décombres par lesquels le sol a été successivement exhaussé.

Le pont d’Yonne présente aussi cette singulière disposition qu’au lieu d’être assis en face de la cité, il en est fort éloigné du côté du sud. Ce qui prouve qu’il est antérieur à la fondation de la ville et qu’il a été construit pour une autre destination.

Lebeuf, qui a vu tous les monuments écrits de l’histoire d’Auxerre, a reconstitué, d’après eux, les environs de la cité. Il existait alors sur les côteaux des paroisses Saint-Père et Saint-Mamert des vignes et des champs. Il en était de même dans les paroisses de Notre-Dame-la-d’Hors et de Saint- Eusèbe.

L’étang de saint-Vigile couvrait tout l’emplacement des jardins existant; entre la rue du 4 septembre et la rue Michelet. Le château de Saint-Germain, qu’on croit avoir été bâti sur un ancien fort de chef gaulois, s’élevait au-delà, à l’est de la cité, sur la rive gauche de l’Yonne.

Les Romains, qui savaient apprécier l’utilité de l’hygiène, plaçaient les établissements insalubres hors des villes. A Auxerre, la boucherie était au-dessous des murs de la cité, du côté du sud ; la poissonnerie occupait l’emplacement de la rue des Cornes ou Sous-Murs; le cimetière public était au faubourg Saint-Amatre.  

MURS DE LA CITÉ ROMAINE.

  Les Romains les bâtirent, les rois de France en prirent ensuite possession, puis ils les cédèrent aux comtes d’Auxerre, qui les tenaient d’eux en fief et leur en firent plusieurs fois hommage

Il n’y avait, comme on l’a vu, dans ces murs, que deux portes: l’une appelée Fiscalis, sise au bas de la rue Fécauderie, l’autre ouverte à l’endroit où est l’horloge. Les poternes de Saint-Pancrace et de Saint-Germain, qui avaient été percées dans le cloître Saint-Etienne, celle du vicomte située derrière le palais, et une autre au bas des Cordeliers, n’avaient pas d’importance.

La cité était défendue par dix tours (voir le plan de la ville) et formait un polygone irrégulier ayant environ 4.400 mètres de développement (Voyez M. Leblanc, Recherches Historiques, t. 1, 45.) On connaît l’emplacement occupé par ces tours. Celle de Saint-Pancrace était à l’angle sud-est; elle existe encore. Celle de l’angle nord est dénaturée. Trois tours s’élevaient sur le côté nord, on en remarque encore une très saillante dans un jardin. Le reste de la tour d’Orbandelle a été démoli au début du XIXe siècle. Elle était pleine jusqu’à une certaine hauteur. La face ouest de la cité, qui était la plus exposée, était défendue par quatre tours, y compris celle d’Orbandelle, tandis que du côté du sud, qui était très escarpé, il n’y en avait qu’une seule, celle de Bruneau ou Brunehaut, appelée ainsi, à cause, dit-on, de la reine de ce nom qui l’avait fait restaurer. L’évêque Maurin, du temps de Charlemagne, y trouva des pièces d’or et s’en servit pour obtenir de ce prince la restitution des domaines de son église envahis par Charles-Martel.

Les murs de la cité avaient une épaisseur de 3 m 40. Ils étaient formés d’un blocage de moellons noyés dans un épais mortier de chaux et ciment, qui, à la longue, a rendu la maçonnerie indestructible. Le parement extérieur se composait à la base de larges assises de pierres de taille jusqu’à une certaine hauteur, puis venait une maçonnerie de petites pierres carrées, de Bailly, régulièrement disposée. On trouve encore à la tour Saint-Pancrace ce système de construction. On y remarque aussi qu’il régnait, de distance un distance, des cordons de briques horizontaux. Le parement intérieur était en petit appareil jusqu’au bas du sol.

En 1245, la comtesse Mathilde établit un droit appelé Ciconiolas, qui était prélevé sur les passants. Lebeuf pense qu’il était imposé sur les habitants qui perçaient les murs de la cite, et même sur ceux qui passaient par ces ouvertures (Lebeuf, Histoire d’Auxerre, t. II , 165.) qu’on fit alors en plusieurs endroits pour communiquer plus facilement avec les rues de la nouvelle ville. Cette tolérance des comtes alla bientôt plus loin. Les habitants sollicitèrent l’ouverture du cloître même. En 1270, les officiers de Jean de Chalon firent percer le mur de la cité du côté d’un grand clos de l’église Notre-Dame-la-d’Hors, qui s’étendait dans les Grands-Jardins (où furent depuis les Bernardines et les providentiennes), de manière qu’on pouvait entrer et sortir facilement dans cette partie de la ville; ils firent enlever aussi a la porte de la poterne qui était au bas de la rue Lebeuf, ainsi que la serrure et les verroux de la Porte-Pendante, de sorte que le cloître du Grand-Chapitre se trouvait ouvert de toutes parts. L’évêque Erard s’émut de l’audace des officiers du comte: il les excommunia d’abord, puis porta plainte au roi contre Jean de Chalon, et finit par obtenir le maintien de l’ancien état des lieux.

On trouve la mention des murs de la vieille cité jusqu’au XVIe siècle, mais ils furent peu à peu envahis, couverts de maisons et disparurent.  

AUXERRE AU MOYEN-ÂGE

  On ne peut douter qu’après l’invasion des Barbares, qui ruinèrent la cité et les environs d’Auxerre, les évêques n’aient fait tous leurs efforts pour relever la ville. On sait qu’aux VIe et VIIe siècles des monastères furent fondés au dehors de l’enceinte trop petite de la cité. L’évêque saint Germain avait, dès le Ve siècle, fait bâtir le monastère de Saint-Cosme, sur la rive droite de l’Yonne. La reine Clotilde avait jeté les fondements du célèbre monastère de Saint-Germain ; saint Didier, vers 620, bâtit au-delà du pont le monastère des Saint-Gervais, Protais, Nazaire et Celse; Saint-Pierre-du-Pont existait déjà à cette époque. Saint Pallade transféra le monastère de Saint-Julien sur l’emplacement de l’antique Autricus, mais sans faire aucunement mention qu’il y eût là des vestiges d’habitations. Il fonda aussi le monastère de Saint-Eusèbe. Saint Vigile établit des moines dans une maison du côté de l’ouest de la cité, vers l’an 680. De toutes parts s’élevaient des foyers de travail et d’activité. Mais ils ne tardèrent pas à être ruinés par les Sarrazins, qui firent irruption dans les environs d’Auxerre, en l’an 732. Les monastères étaient à peine relevés que les Normands, remontant la Seine et l’Yonne dans leurs petits bateaux de cuir, vinrent encore les ravager (fin du IXe siècle). Saint-Marien fut complètement détruit; Saint-Germain résista et ne fut pas pris.

Au XIIe siècle les éléments d’une ville nouvelle étaient nés. Auxerre, comme centre religieux et comme producteur de vins renommés, avait vu s’accroître sa population; des chemins qui conduisaient à la cité et aux monastères se bordaient de maisons. Il ne fallait plus qu’un effort pour relier ces divers tronçons et en faire un tout compact.

En 1166, le comte Guillaume IV résolut d’entourer de murs les cinq ou six bourgs qui s’étaient formés autour des monastères afin de les mettre à l’abri des attaques des ennemis. Pierre de Courtenay acheva, vers 1192, la construction de l’enceinte sur le bord de la rivière, de sorte que la ville reçut alors sa physionomie définitive et telle qu’elle l’a conservée jusqu’à nous.

Elle était loin, toutefois, de présenter sinon une grande régularité, qu’on n’y trouve même pas aujourd’hui, mais au moins la propreté des villes modernes. Les rues, à demi pavées, étaient remplies de tas de décombres et d’ordures; les habitants ne se gênaient pas pour y déposer partout leurs fumiers et les terres provenant des fondations ou des caves des édifices. Lorsque le roi Charles V devint maître du Comté, en 1371, il fut obligé de prescrire à son voyer, Jean de Meaux, de faire nettoyer la ville. Mais on peut supposer, sans présomption, que bien longtemps après il y eut des infractions aux règlements sur la voirie.

Les bas quartiers de Saint-Père et de Saint-Pèlerin, habités par les artisans et les vignerons, conservèrent jusqu’au début du XIXe siècle un aspect pauvre et agreste. Aussi disait-on: « les ménagiers de Saint-Père qui font d’une allumette deux fois ( Il est vrai qu’on ajoutait aussi : « et d’une pinte de vin un coup. »), et par opposition « les nobles de Saint-Eusèbe,» quartier où résidaient de préférence les familles bourgeoises.

Le quartier de la marine, plus riche ou au moins plus aisé que celui de Saint-Père, avait au moyen-âge une population active et laborieuse qu’on retrouve encore de nos jours. Les maisons y sont pressées. Les pignons de bois à plusieurs étages donnaient asile aux rudes mariniers, plus nombreux autrefois qu’à présent. Le centre de la ville, ce qu’on nommait la cité, était le foyer du commerce, le quartier des affaires; la place y était rare, on ne la perdait pas en jardins comme dans les paroisses de Saint-Eusèbe et de Notre-Dame-la-D’Hors.

Le moyen-âge, où régnait le pittoresque d’une manière si variée dans la disposition fantastique des maisons à pignons aigus, à baies étroites, ce temps si fécond un expressions individuelles, portait loin les fantaisies de caractère dans les enseignes de commerce. Mais la gravité des mœurs puritaines de la bourgeoisie des derniers siècles a fait disparaître, à Auxerre comme ailleurs, et même plus qu’ailleurs, les vestiges de l’esprit inventif de nos pères. On ne trouve plus de traces des enseignes de la Truie qui file, du Grand Renard, du Grand Monarque, etc., etc.

TEMPS MODERNES

  L’administration municipale, en établissant un meilleur pavage dans toute la ville, en y amenant les eaux de Vallan, cette fois sérieusement et d’une manière durable, un établissant le gaz, a ouvert la voie aux embellissements particuliers. Le commerce a jeté à bas les vieilles petites ouvertures qui répandaient un jour douteux dans les boutiques. Les façades se sont ouvertes sur toute la largeur possible, et les produits de l’industrie y sont étalés derrière de vastes vitrines en glaces. Les magasins se sont allongés indéfiniment, du manière à produire, par d’ingénieuses dispositions, une illusion complète sur leur véritable étendue. L’ouverture de l’embranchement du chemin de fer de Paris à Lyon, en 1855, a donné un nouvel aliment à l’activité du pays. D’autre part, le département a établi dans la ville un nouveau palais de justice, qui est un monument, un asile d’aliénés et un pénitencier. L’ancien palais a été transformé et a reçu, dans ses vastes salles, les collections scientifiques et artistiques du pays. Au dehors les principales promenades ont été embellies; une oeuvre d’art magistrale, la statue du maréchal Davout, termine heureusement la perspective de la promenade du Temple. Le progrès est donc manifeste : et s’il reste encore quelques quartiers en dehors de ce mouvement, ils semblent avoir été conservés comme des spécimens du vieil Auxerre, curieux à montrer aux étrangers et utiles pour établir l’authenticité de nos récits archéologiques.